En tant qu’individus, nous nous retrouvons souvent pris dans des schémas comportementaux qui semblent résonner à travers les générations de notre arbre généalogique. C’était justement le sujet de conversation avec mes beaux-parents quelques jours avant le réveillon du Nouvel An 2023. Il y avait mon beau-père, hypnothérapeute, ma belle-mère, ma femme et moi-même, également hypnothérapeute. On a la chance d’avoir des échanges assez ouverts et réfléchis, je trouve, et ce soir-là, nous avons parlé en toute sincérité des aspects de nous-mêmes avec lesquels nous avons du mal.
Pour ma part, je lutte depuis longtemps avec la procrastination, comme si j’étais spectateur de moi-même. Cette procrastination est en réalité de l’anxiété. Une anxiété née d’une peur de l’échec, donc une peur d’essayer, afin de ne pas échouer tout court. J’ai appris ce comportement en l’observant chez mes parents, qui vivaient dans une dynamique très dysfonctionnelle générant énormément de stress, un stress qui créait de l’anxiété. Ou comme l’a dit un jour mon père : « La maladie mentale ne court pas dans la famille, elle galope. »
Mon beau-père et ma femme ont évoqué un point commun entre eux : la colère, et la difficulté à la contrôler dans des moments nés du stress. Le père de mon beau-père est un homme connu depuis longtemps pour être, disons, perpétuellement stressé. Comme une lune qui régule les marées, il contrôlait l’état de sa famille, déversant son stress sur les autres à sa guise. Mon beau-père pense que cela trouve son origine dans le suicide brutal de son propre grand-père – un traumatisme, en somme – un traumatisme qui a marqué la famille sur plusieurs générations. On pourrait appeler cela un « traumatisme transgénérationnel », mais en explorant la manière dont le stress nous façonne, nous avons conclu (avec notre regard d’hypnothérapeutes) que la conversation devait s’orienter vers l’épigénétique.
Le concept d’épigénétique offre une perspective profonde sur la manière dont ces schémas, apparemment hérités de nos ancêtres, peuvent influencer nos comportements et nos prédispositions. Je ne suis ni épigénéticien ni scientifique biochimique, mais je suis profondément intéressé par l’intersection entre l’hypnothérapie et l’épigénétique, et par la façon dont ce champ peut offrir une passerelle fascinante pour comprendre et transformer les comportements enracinés dans notre subconscient. Le subconscient, c’est quelque chose que l’on porte en nous avant même la naissance, construit en profondeur, au niveau de l’ADN ou d’une matière grise collective – un subconscient qui doit bien recevoir des instructions de quelque part… disons, de l’épigénétique.
L’épigénétique est un domaine encore jeune, en constante évolution, mais qui a rapidement montré un potentiel extraordinaire dans l’étude des changements héréditaires de l’expression des gènes, sans modification de la séquence ADN elle-même. Plutôt que de changer le code génétique, les mécanismes épigénétiques modifient la manière dont les gènes sont activés ou désactivés. Ce domaine met en lumière comment des facteurs environnementaux, des expériences ou même des traumatismes peuvent laisser des marques moléculaires sur notre ADN, influençant notre comportement et notre santé.
Lorsque nous parlions d’épigénétique dans le contexte de l’hypnothérapie, ce soir-là à Paris, devant le feu, il est devenu clair que les comportements que nous adoptons ne proviennent pas uniquement de nos propres expériences ou choix, mais qu’ils pourraient être influencés bien avant même notre première respiration – et qu’ils affectent ensuite notre manière de respirer, de vivre. Prenons par exemple mon anxiété et ma procrastination – un combat partagé par beaucoup. Ces traits ne résultent peut-être pas uniquement de mes expériences personnelles ou de celles de mes parents que j’ai observées et absorbées, mais pourraient être profondément enracinés dans des empreintes génétiques et épigénétiques héritées sur plusieurs générations. En réalité, je connais d’autres membres de ma famille élargie qui rencontrent des difficultés similaires.
De même, pensons à la gestion de la colère transmise de génération en génération. Il est tout à fait plausible qu’un traumatisme non résolu ou des événements éprouvants vécus par nos ancêtres aient laissé une empreinte indélébile sur leur épigénome, se manifestant plus tard par une instabilité émotionnelle ou une difficulté à réguler les émotions. Alors, où tout cela nous mène-t-il ? Quel carrefour suis-je en train d’indiquer ?
En tant qu’hypnothérapeutes, ni mon beau-père ni moi n’utilisons cette compréhension comme excuse ou justification. Au contraire, l’hypnothérapie nous offre une voie unique pour explorer et aborder ces schémas profondément enracinés. Grâce à l’hypnose, on peut accéder au subconscient – ce réservoir de croyances, d’émotions et d’expériences – là où ces comportements hérités peuvent résider. En entrant dans cet espace, l’hypnothérapie cherche à identifier, reformuler et reprogrammer des croyances et comportements bien ancrés, transmis depuis plusieurs générations.
Le processus d’hypnothérapie consiste à guider une personne vers un état de relaxation, permettant à l’hypnothérapeute de l’aider à travailler avec son esprit subconscient afin d’aborder des comportements comme l’anxiété, la procrastination ou les problèmes de colère. En amenant ces schémas à la conscience, l’hypnothérapie donne aux individus le pouvoir de sortir du cycle de comportements et croyances hérités qui ne leur servent plus. Dire que l’on peut s’en débarrasser ou les surmonter ne serait ni juste ni vrai. En revanche, on apprend à vivre avec, à mieux s’accepter, parce qu’on a accédé à une compréhension plus profonde de son propre subconscient – ce qui permet ensuite de mieux réguler ses comportements, et ainsi, petit à petit, d’avancer vers les changements que l’on a toujours souhaités ou vers une version de soi plus juste, plus authentique. En somme, on peut se reprogrammer – mais cela n’est possible que lorsque le « soi conscient » et le « soi subconscient » apprennent à se connaître.
Ce qui est fondamental, c’est que tout comme les scientifiques ont mis au point des techniques permettant de manipuler les marqueurs épigénétiques en laboratoire, l’hypnothérapie propose des techniques pour reprogrammer l’esprit subconscient, en remplaçant les schémas de pensée négatifs par des pensées positives, et même en y insufflant des croyances et mécanismes bénéfiques – de toi à toi. Ce processus peut contribuer à « recâbler » les circuits neuronaux du cerveau, favorisant des comportements et des réponses plus saines, et rompant efficacement les chaînes des prédispositions héritées.
Donc je pense qu’on peut dire ceci : nous devons reconnaître le rôle de l’épigénétique dans la formation de notre paysage comportemental, et comprendre dans ce contexte comment l’hypnothérapie est un outil puissant pour ceux qui souhaitent mieux se connaître et se transformer. En démêlant les couches de comportements et de croyances hérités enfouis dans le subconscient, on peut ouvrir la voie à une véritable croissance personnelle et à un changement durable.
Avant de conclure, je voudrais insister sur un point : le voyage vers la découverte de soi et la transformation commence par la volonté sincère d’explorer les profondeurs de son propre esprit. Il y a une raison pour laquelle Descartes a dit très simplement : « Je pense, donc je suis. »
L’hypnothérapie est l’outil qui peut justement t’aider à faire cela.
Lectures complémentaires ci-dessous :
A-bioinformatic-analysis-of-the-molecular-genomic-signature-of-therapeutic-hypnosis.pdf (researchgate.net)
Hypnotherapy for agoraphobia—Feasibility and efficacy investigated in a pilot study – PMC (nih.gov)
Hypnotherapy and IBS: Implicit, long-term stress memory in the ENS? (cell.com)
Implications on hypnotherapy: Neuroplasticity, epigenetics and pain – ScienceDirect